'Un chemin de tables' de Maylis de Kerangal
(Editions du Seuil)
C'est l'histoire de Mauro, un étudiant en éco, qui s'approche petit à petit du monde de la cuisine, puis qui en fait son métier. On le suit pendant une dizaine d'années à Paris essentiellement, de cuisine en cuisine, on suit son chemin de tables. Après un poste de 'garde-manger' dans une brasserie traditionnelle, il décide d'apprendre sur le tas en proposant sa candidature pour des stages non rémunérés. Dans un resto gastronomique où il est malmené, même harcelé; dans un petit bistrot gastronomique où il est adopté par l'équipe comme dans sa propre famille: nous l'accompagnons pendant tout ce (court) roman dans ses expériences- bonnes ou mauvaises - mais toujours riches et formatrices. Il ne cherche pas à se placer, mais à apprendre.
Il décide de passer son C.A.P cuisine en candidat libre, ouvre ensuite son restaurant 'La Belle Saison' et continue malgré tout son son chemin de tables...
Mon avis: Ce roman, je l'ai lu deux fois en 6 mois. A la première lecture, avant que je commence ma formation en cuisine et mon stage, je me suis dit qu'il en aurait fallu un peu plus pour me dissuader de choisir cette voie mais que waouh, c'est dur comme milieu (alors pour une femme, ça doit être pire)! A la deuxième lecture, à mi-parcours de ma formation, je l'ai lu complètement différemment. Ma propre expérience ne suffit pas à me faire une idée de ce qui se passe dans les cuisines, mais la somme de toutes nos expériences (celles de mes camarades en reconversion, mes profs) reconstitue le puzzle de ces restos, ces différentes façons de cuisiner, de manager et de former.
Il m'a beaucoup plu car il parle un peu de ce que je vis actuellement. Mauro est un autodidacte passionné qui part dans ce domaine par envie. Dès la première page il feuillette dans le train mon livre de chevet du moment 'La Cuisine de Référence' (éditions Bpi) qu'il a acheté de lui-même, comme moi, pour apprendre seul les gestes professionnels. Une cinquantaine de pages plus loin il découvre le contenu de sa mallette de couteaux comme j'ai découvert la mienne.
Ce roman est aussi magnifiquement écrit. Je le conseille donc aux cuisiniers, mais aussi à tous les autres !
Maylis de Kerangal a également écrit 'Réparer les vivants', récemment adapté en film.
Extrait: ' (...) A 11 heures, tout le monde s'arrête : c'est le grand nettoyage. La cuisine se refait une beauté et s'organise pour le service. Chacun frotte avec conviction une portion de l'espace, grimpe sur les cuisinières, étire son bras sur les surfaces en inox, dévoilant alors le haut du caleçon et une lanière de peau si possible. On étale partout les tapis de caoutchouc perforé qui assourdiront les bruits. Après quoi, le tempo accélère graduellement et quand enfin ça démarre, c'est beau à voir, rapide et fluide, scandé et précis, les assiettes décampent les unes après les autres au gré des annonces. (...) '